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Mémoire d’esclaves

Inscrite à l’agenda de l’UNESCO en 2004, la Journée Internationale du Souvenir de la Traite Négrière et de son Abolition (JISTNA) est célébrée le 23...

La banque de demain…

Afrology a lancé en 2020 un projet de création d’une banque d’épargne et d’investissement. La Banque de demain regroupe des africains de la diaspora répartis...

Noir et esclave au XXIe siècle…

Suis-je digne d’être noir?

Je suis noir, d’Afrique, d’Europe, d’Asie, d’Amerique et d’ailleurs.
Je suis noir d’Afrique, mais aussi descendant d’esclave…

Longtemps j’ai banalisé le racisme des maghrébins vis-à-vis des Noirs, à l’exclusion du Noir d’Amérique…
Longtemps j’ai combattu le colonialisme et exigé une expiation des portugais, des anglais, des français, des belges…
Aujourd’hui encore nous célébrons l’abolition de l’esclavage.

L’esclavage a conduit à la colonisation, puis aux indépendances. Les indépendances ont donné naissance aux dictatures contraignant les noirs d’Afrique à l’exil… Émigrant ou exilé, il est stigmatisé et assimilé à un sous homme ou une « peste humaine » jetée en pâture à l’opprobre sociale. Et lorsqu’on daigne lui reconnaître le statut d’humain par un petit séjour, il doit effectuer le parcours d’humiliation…

Quel est le statut du noir?

Homme ou sous-homme ?
Sous-Homme ou bête humaine?
Cuba et la Libye, à une époque, étaient un exemple de pays creuset de diversité. Puis en Libye survint la chute du régime du «berger de Syrte », Khaddafi. Dès lors accusés d’avoir constitué le bras armé du régime déchu, les noirs ont été pourchassés, lynchés et emprisonnés pour être vendus. Et ce, dans l’indifférence totale et la plus absolue. Tant de l’Europe qui défendait les droits de l’Homme en Libye, que des états africains qui ont fermé les yeux.

Que fait le « nègre »?

L’africain est passé expert dans les condamnations de la colonisation. Il en exige même des réparations. Que fait-il face à l’institutionnalisation de l’esclavagisme en Libye? Il lance des pétitions sur internet. Qui y a accès?…

Ceux de la diaspora manifestent, mais devant les ambassades libyennes. Pourquoi pas devant leur propre ambassade pour interpeller leurs dirigeants ou à défaut aux sièges des acp, cemac, cedeao ou mieux de l’union africaine ?

Les chefs d’état africains et leurs diplomates se murent dans un silence complice. Sujet délicat, puisqu’ils sont la cause de ce phénomène à la mode en Libye liée à la crise de l’immigration vers la Méditerranée que personne ne veut régler. Critiquer l’esclavage en Libye reviendrait à remettre en cause le « prix du silence » avec l’Union européenne:

  • Silence coupable contre financement des états et institutions comme l’UA ou les ACP…
  • Silence en contrepartie du financement des programmes d’état civil et de documents d’identité dont les passeports biometriques…

Mais cette question libyenne n’est pas politique. C’est une question économique qui interpelle la dignité humaine.

La dignité a fui le nègre.

La banalisation de l’humiliation du nègre anesthésie la conscience collective nègre.

Que faire?

On dit du Nègre qu’il n’est doué qu’en musique ou en sport. Et il est reconnu et adulé dans ces disciplines qui le projettent dans les sphères économiques et financières mondiales.
Et pourtant…

Ni point POING levé;
Ni main sur le cœur;
Ni genou à terre;
Manque d’inspiration?
Claudy Siar s’indigne. Thuram Lilian est stupéfait. Kassav’ s’interroge…est-ce possible au XXIe siècle? Ils sont descendants d’esclaves et gardent la dignité nègre.

Et les autres?
Ceux d’Afrique… Les chanteurs Alpha Blondy et Koffi Olomidé ont adressé un message aux représentants du continent. Et ceux-là qui en Afrique ont un pouvoir de décision? Ni sommet extraordinaire de l’Union Africaine, ni initiative d’indignation d’un Chef d’Etat de la part de ces Charlie-Noirs...

Demain certains iront manifester devant une représentation diplomatique.
L’africain ne comprend pas que se taire sur le mauvais traitement d’un alter ego ne sauve ni sa dignité ni son honneur. Car qui qu’il soit, derrière le sourire de circonstance qui lui sera adressé, il restera un « pauvre nègre ». Satisfecit et honneurs lui seront adressés, mais c’est pour mieux l’exploiter, car il restera l’esclave des idées des autres.

Ainsi, afin de continuer à l’exploiter, il est endormi par des anathèmes de l’enfant d’un Continent émergent. Soit on émerge du néant, soit on sombre dans le néant… Peut-on être un continent émergent lorsque sa population active est en fuite?

Peut-on rentrer et s’intégrer dans l’économie moderne mondiale (circulaire, industrielle ou biologique) , lorsque les acteurs économiques sont des esclaves vendus sur la place publique? Je m’interroge…. Et moi-même, quelle sera ma contribution ou ma part de responsabilité ?

Je m’interroge…

Bruxelles, le 29 novembre 2017
Spero N. Houmey