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L’Afrique de l’Ouest est-elle prête pour une monnaie unique ?

Les chefs d’Etat de la Cédéao souhaitent remplacer le franc CFA et les autres devises en cours dans la zone, mais les obstacles sont nombreux dont les plus importants selon nous sont l’absence de volonté politique et le manque de compétence. Les deux raisons sont liées, étant donné que le politique ne se donne pas les moyens de financer la recherche-développement sur le sujet avec l’aide de spécialistes compétents.

Diversité d’intérêts

Lors du sommet des chefs d’Etat du mardi 24 octobre à Niamey, la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao) a répété sa volonté de créer une monnaie unique pour ses quinze pays dès 2020, mais le Nigeria, poids lourd de la zone, a exprimé sa réticence.

Sujet sensible sur la table des dirigeants depuis les indépendances des années 1960 (K. N’Krumah – S. Olympio…), une monnaie unique pour les quinze pays de la Cédéao, qui remplacerait le franc CFA et sept autres devises nationales, apparaît difficile à mettre en place rapidement au vu des problèmes de convergence économique et financière entre les Etats. Le sommet a cependant proposé « une approche graduelle privilégiant un démarrage avec les pays qui respectent les critères de convergence », selon le communiqué final du sommet lu par le ministre nigérien des finances, Hassoumi Massoudou.

Huit monnaies différentes

Créée en 1975, la Cédéao regroupe aujourd’hui quinze pays totalisant 300 millions d’habitants qui utilisent des monnaies différentes. Huit de ces pays regroupant 155 millions d’habitants ont en commun le franc CFA, arrimé à l’euro, et sont rassemblés au sein de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) : le Bénin, le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, la Guinée-Bissau, le Mali, le Niger, le Sénégal et le Togo.

Les économistes sont divisés sur les coûts et les bénéfices du franc CFA, à la fois garant de stabilité mais monnaie trop forte pour des pays aux économies fragiles. Certains plaident pour sa réforme, par exemple en l’arrimant à un panier de monnaie euro-dollar-yuan. Le communiqué final n’a pas fait état de cette question.

Chacun des sept autres pays de la Cédéao a sa propre monnaie : l’escudo pour le Cap-Vert, le dalasi pour la Gambie, le cédi pour le Ghana, le franc guinéen pour la Guinée, le dollar libérien pour le Liberia, le naira pour le Nigeria et le leone pour la Sierra Leone. Ces monnaies ne sont pas convertibles entre elles, ce qui ne facilite pas les échanges.

Un bilan négatif

Le président de la Commission de la Cédéao, Marcel De Souza, avait indiqué dès le début du sommet qu’il pensait impossible qu’une monnaie unique voie le jour en 2020, contrairement au programme prévu. Malgré des « progrès sur la convergence macroéconomique », « les résultats sont faibles : nous ne pouvons pas aller en 2020 à la monnaie unique », a-t-il déclaré.

M. De Souza a dressé un bilan assez négatif. « La feuille de route » pour la monnaie unique « n’a pas été mise en œuvre vigoureusement ». « De 2012 à 2016, aucun de nos pays n’a pu respecter de manière continue les critères » du programme de convergence macroéconomique ; l’harmonisation des politiques monétaires « entre les huit monnaies de la Cédéao, qui devait précéder la monnaie unique », n’est pas faite ; et « l’institut monétaire », prélude à une banque centrale commune, n’a pas vu le jour, a-t-il noté.

Pas étonnant, quand on connait la réticence de certains acteurs importants comme les Banques “dites Centrales” qui ont peur de perdre certains de leurs privilèges actuels ou même Alassane Ouattara de la Côte d’Ivoire qui fait l’apologie du CFA…

Retards de mise en route et garantie de service

Occupés pour certains à négocier la protections de la France contre leur maintien au pouvoir, certains dirigeants africains font de la question de la monnaie un élément de pression ou de chantage. ils ont néanmoins décidé de faire preuve de volontarisme politique, réaffirmant leur engagement à poursuivre et à accélérer « la réalisation de l’agenda de l’intégration économique et monétaire » et demandant au comité ministériel de la Cédéao de « se réunir dans un délai de trois mois pour proposer une nouvelle feuille de route en vue d’accélérer la création de la monnaie unique en 2020 », selon le communiqué final.

Le président nigérien, Mahamadou Issoufou, a suggéré la mise en « circulation à partir de 2020 » d’une monnaie unique au sein des pays de la Cédéao « qui sont techniquement prêts », suivant le modèle européen avec l’euro. « L’adhésion » des autres Etats pourrait se faire de façon progressive. La proposition a été reprise dans le communiqué final, même si tous savent qu’il s’agit de vœux pieux.

Dans un communiqué séparé, le président nigérian, Muhammadu Buhari, a invité ses pairs à « avancer avec prudence vers l’intégration », citant l’exemple des déboires de l’Union européenne avec l’euro. Le président Buhari a pointé la persistance d’importantes disparités macroéconomiques entre les pays de la Cédéao et le manque de « préparation » des Etats pour aller vers une monnaie unique.

Un nouveau sommet des chefs d’Etat est programmé en février 2018 à Accra, une garantie pour certains acteurs de prolonger leurs contrats de services et/ou mandat.

Bruxelles, le 22 Novembre 2017

Afrology avec AFP

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